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exécutants, ou d'administrateurs qui exécutent, chacun en particulier, ce qu'ils ont tous délibéré en commun. Dans le premier cas, le conseil administratif est séparé de l'administration; et, dans l'autre, il est réuni avec elle : mais, dans les deux cas, le conseil administratif doit diriger l'administration suprême, afin que l'administration suprême n'agisse jamais sans conseil.

Il est très-difficile de bien organiser le conseil administratif de l'état, parce que, si on le compose de simples conseillers délibérants, il n'y a plus de responsabilité pour les ministres exécutant ce que d'autres ont délibéré; et que, si on le compose des seuls ministres exécutant ce qu'ils ont eux-mêmes délibéré, il n'y a plus de fixité dans l'administration, chaque nouveau ministère pouvant renverser ce qui a été établi par l'ancien; et c'est ce qui a engagé quelques gouvernements à mêler, dans le conseil administratif, des conseillers permanents avec des ministres temporaires, et ce qui en a engagé d'autres, à attacher à chaque section du ministère des conseillers délibérants, ou un comité conseillant; mais ce comité a l'inconvénient de rompre l'unité du ministère, puisque, dans ce cas, les ministres délibèrent chacun avec des conseillers particuliers, au lieu de délibérer tous en commun. Le meilleur mode d'organisation, que l'on ait trouvé jusqu'ici, est de ne composer

le conseil administratif que des seuls ministres; et d'établir, à côté de ce conseil, un conseil judiciaire et un conseil militaire, indépendants l'un de l'autre, mais liés tous deux à l'administration suprême, qui doit faire exécuter leurs délibérations quand elles sont conformes aux lois de l'état.

Le conseil ou la cour judiciaire, qui dirige l'administration judiciaire, doit être divisé en trois sections au moins: l'une, pour juger les affaires contentieuses et les conflits de juridiction entre les divers magistrats; l'autre, pour reviser les jugements où l'on aurait violé les formes et contrevenu aux lois; la troisième, pour juger les comptes de tous les comptables de l'état; et, toutes les trois réunies, pour juger les magistrats qui n'auraient pas exécuté les lois.

Le conseil ou la cour militaire doit être divisé, dans tous les états maritimes, en deux sections au moins; l'une pour diriger l'administration militaire, et l'autre, l'administration maritime. Cette dernière est généralement connue sous le nom d'amirauté.

Telle est la hiérarchie la plus propre à la distribution des pouvoirs. Cette hiérarchie doit avoir trois degrés, et être composée d'administrations inférieures, liées par une administration intermédiaire à l'administration suprême.

L'administration à un seul degré convient mal à tous les états, parce qu'elle ne peut pas être suffisamment modérée. L'administration à deux degrés peut convenir aux petits états, parce qu'elle est la plus simple: mais l'administration à trois degrés convient mieux aux grands états, parce qu'elle est la plus tempérée; tandis qu'une administration plus compliquée ne peut convenir à aucun état, parce qu'elle est trop difficile à diriger, et que les administrateurs supérieurs, ne pouvant eux seuls la diriger, sont obligés de la livrer à des commis. De là tous les désordres qui s'y glissent, parce que des commis ne peuvent pas avoir le zèle des magistrats.

Ce dernier mode d'administration est encore le plus sage, parce que l'administration y est dirigée, dans chaque degré, par un conseil : l'administration municipale, par le conseil de la commune; l'administration provinciale, par le conseil de la province; et l'administration suprême, par le conseil dirigeant de l'état en sorte qu'il n'y a aucune administration publique qui ne soit dirigée par un conseil.

Mais quel est le meilleur mode d'administration, ou de l'administration simple dans laquelle les administrateurs délibèrent et exécutent en même temps, ou de l'administration composée dans laquelle les uns délibèrent et les autres exécutent séparément ?

L'administration simple est plus favorable à la promptitude de l'exécution; et l'administration composée, à la sagesse de la délibération. La première est plus rapide, parce que le même homme qui délibère, exécute; la seconde est plus sage, parce que l'homme qui exécute, n'agit que d'après la délibération d'un autre. Celle-ci a donc une règle fixe, tandis que celle-là agit tantôt d'après une règle et tantôt d'après une autre, suivant le caprice du magistrat qui gouverne ou des commis qui gouvernent pour lui.

L'administration simple a d'autres inconvénients: elle ne peut être renouvelée qu'intégralement, tandis que l'administration composée peut l'être partiellement. Or, si le renouvellement intégral est plus favorable au changement, le renouvellement partiel l'est davantage au perfectionnement : le premier tend à changer la société, l'autre à l'améliorer et à la fixer.

On dit que le renouvellement intégral l'agite plus fortement; mais le renouvellement partiel l'agite plus souvent; et en vérité la société n'est guère moins agitée par une élection que par plusieurs, parce que ce n'est pas seulement la multiplicité des chances, mais l'existence d'une seule qui éveille les ambitions.

Le renouvellement des magistratures a donc toujours des inconvénients, et c'est pour éviter

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ces inconvénients, que, dans quelques états, on a cherché à rendre les magistratures permanentes; mais la permanence des magistratures en a de plus grands encore, parce que l'habitude du pouvoir corrompt les hommes. Il est vrai que l'on exerce mieux un pouvoir que l'on est habitué à exercer; mais on en abuse aussi plus aisément, parce qu'on le regarde comme son bien, tandis qu'aucun individu n'ose abuser d'un pouvoir qu'il n'exerce que passagèrement, parce qu'il craint qu'après en avoir abusé contre les autres, on n'en abuse contre lui.

Il n'est donc aucun mode d'administration qui n'ait ses avantages et ses inconvénients; et c'est ce qui a engagé quelques gouvernements à corriger l'un par l'autre, à mêler les magistratures temporaires avec les magistratures perpétuelles, le renouvellement partiel avec le renouvellement intégral, et à adopter tour à tour l'administration simple et l'administration composée, tantôt l'une dans la commune, tantôt l'autre dans la province, et quelquefois l'une et l'autre dans l'état.

Les anciens avaient presque partout partagé l'administration suprême entre plusieurs magistrats égaux entre eux, pour ne pas donner trop de pouvoir à l'un, et pour modérer celui de tous; mais, comme, parmi ces magistrats, il y en a toujours un qui, soit par ruse, soit par force, finit

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