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Dès que les lois civiles créent l'opulence territoriale, ou, ce qui est la même chose, la pauvreté de la population, il faut qu'elles chargent la première de pourvoir à la subsistance de l'autre, et de combler les vides que peuvent laisser l'industrie et le commerce, ressources malheureusement précaires, comme l'ont prouvé Venise, Gênes et la Hollande. Ces ressources s'épuisent-elles en effet comment nourrir les classes pauvres qu'elles faisaient vivre? Telle est la question. Je sais tout ce qu'on pourrait dire sur cette matière, ce qu'on peut y puiser de paradoxes ou de raisonnemens, de certitudes ou d'hypothèses, de contraire ou de conforme à la science de l'économie politique, tant soit peu neuve encore, féconde en abstractions, trop systématique, et quelquefois démentie par de funestes expériences mais ce n'est pas ici le lieu de discuter un pareil sujet, non moins obscur que la plus ardue des propositions métaphysiques, et susceptible de trop longs développemens. Aussi bien le tems arrivera où la question se résoudra d'elle-même, et probablement d'une façon que les savans ne prévoient guère, et qu'ils tenteront de donner pour une conséquence de leurs raisonnemens. En atten

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dant, prenons possession du gîte qui nous est offert. Au sein d'un pays si ingrat, si sauvage. quelle agréable surprise de trouver des appartemens fermés de croisées à grands carreaux, et de serrures et de verrous brillans comme de l'acier, des lits souples et garnis de rideaux de mousseline, des meubles d'acajou, des glaces, des tapis! Comme on aime en voyage ce luxe propre et commode! Bien que nous en ayons déjà contracté l'habitude, c'est chaque fois une jouissance nouvelle de le rencontrer presque partout, accompagné le plus souvent d'un service officieux et prompt, seulement un peu coù

teux.

UN RILAIS PARCOURU A PIED FAUTE DE CHEVAUX.

LA VALLÉE DE LA SPEY.

LES CHAUMIÈRES DES HIGHLANDS. LEURS HABITANS.

BALLADE DE LA BELLE ANNIE DE LOCHROYAN. PITMAIN.

LA VALLÉE DE BADENOCH.-UN ANCIEN CIMETIÈRE.

SOUVENIRS DE MACPHERSON. LES POÉSIES D'OSSIAN. — AVIEMORE.

LA MONTAGNE DE CAIRNGORM.

FREEBURN,POINT DE CHEVAUX DE POSTE. LE LAC MOY.

MOYHALL. INVERNESS.

Inverness, le 19 juillet 1826.

L'hôte de Dalwhinnie n'avait point de voiture à nous donner, contre-tems qui se reproduit fréquemment dans le nord de l'Écosse. La seule manière d'y voyager commodément est d'en amener une avec soi; sinon il arrive qu'on est obligé d'attendre les diligences ou les malles-postes qui souvent n'ont point de place vide. Force a été de nous emballer, bagages et gens, sur un tombereau à bords évasés, tel qu'on les fait ici, fort bien peint en bleu foncé, soigneusement lavé, mais point suspendu, et solidement boulonné sur son essieu. A demi couchée sur quel

ques bottes de paille, pliée dans un plaid édimbourgeois sur lequel elle avait jeté un schall Rob-Roy, notre compagne s'y est établie tant bien que mal. Je m'étais d'abord placé auprès d'elle; mais, fatigué des cahots, je suis bientôt descendu. Mon ami, piéton leste et résolu, s'était déjà mis en marche. Je l'ai rejoint; et nous avons cheminé ensemble, tantôt en avant, tantôt en arrière de notre caravane. Treize milles, plus de quatre lieues françaises, nous séparaient du prochain relais. Intrépides chasseurs que nous sommes, nous en aurions pris notre parti gaiment, si la brume dont nous avions été charmés la veille, ne s'était épaissie à chaque instant davantage. Les sombres nuages qui ce matin enveloppaient les monts de Dalwhinnie, et dormaient à la surface de son lac, nous suivaient et en amenaient d'autres. La pluie a commencé, fine d'abord, puis assez forte. Alors le silence et le sérieux nous ont gagnés. Prenant toutefois notre mésaventure en patience, nous ne nous sommes plus guère arrêtés, ni pour cueillir des fleurs sauvages, ni pour ramasser des cailloux de forme curieuse, ni pour écouter le murmure de l'eau rare et brillante du Truim que nous ne cessions de côtoyer, ou pour la regarder couler.

Notre attention était-elle attirée par quelque indice d'habitation humaine? Aussitôt nous nous hâtions d'interroger notre jeune conducteur. Lui, assis sur l'un des brancards du tombereau, les jambes pendantes, les guides dans une main, l'autre armée d'un fouet de cuir tressé, appuyé sur son épaule et dont l'extrémité vole et flotte au gré du vent, il nous regarde comme s'il était sourd ou hébété, répond quelques mots obscurs, et appelle doucement de la langue son cheval, qui allonge un moment le pas pour reprendre ensuite sa lenteur accoutumée. Nous n'avons plus d'autre pensée que celle d'arriver; et rien ne nous indique si nous avançons.

Après deux heures de marche, nous entrons dans la vallée de la Spey. Cette rivière, qui prend sa source dans un petit lac auquel elle emprunte son nom, traverse obliquement la partie orientale de l'Inverness-Shire, sépare les comtés de Murray et de Banff, et se jette à SpeyMouth dans la Mer du Nord. Ni l'ondée d'hier, ni celles d'aujourd'hui n'ont grossi son cours. Des filets d'eau baignent à peine les inégalités les plus creuses de son lit. Quelquefois le rivage offre un aspect riant; mais cette impression se dissipe bientôt à la vue des chaumières isolées.

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