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Dans l'illustre Ingelo j'avais lu tout cela.
Mais ce que vous vantez, docteur, je le méprise;
Vous appellez raison, moi je nomme sottise
Ce don surnaturel par qui seul, en effet,
Un atôme, d'un Dieu croit être le portrait,
Mesure sa faiblesse à la Tout-puissance,
Près de l'éternité met sa courte existence,

Et, malheureux, se croit formé pour le bonheur.
Raison, faible instrument de vertige et d'erreur,
Toi qui penses d'un Dieu pénétrer les mystères,
Et te perds follement dans tes propres chimères,
Oui, c'est toi qui bâtis ces petites maisons,
Ces Bedlams décorés de respectables noms,
Ces universités et ces académies,

Théâtres discordans des humaines folies.

Là, ces graves penseurs, grimpés sur leur raison,
Comme Astolfe autrefois monta sur son griffon,
D'un monde illimité vont franchir les limites.
Là, ces fats encloîtrés, paresseux cénobites,
A servir les humains craignant de s'abaisser,
Ne sachant point agir, s'enferment pour penser.
Sans action, pourtant, il n'est point de sagesse,
Où l'action finit, docteur, le bonheur cesse.

Mais pour trancher ici des discours superflus, J'estime la raison et j'en blâme l'abus;

That reason which distinguishes by sense,

And gives us rules of good and ill from thence:
That bounds desires with a reforming will,
To keep 'em more in vigour, not to kill.
Your reason hinders, mine helps to enjoy;
Yours would renewing appetites destroy.
My reason is my friend, yours is a cheat:
Hunger calls out, my reason bids me eat,
Perversely yours your appetite does mock;

This asks for food, that answers, what's o' clock? doubt secures;

This plain distinction, sir,

your

"Tis not true reason I despise, but

yours.

Thus I think reason righted; but for man,' I'll ne'er recant, defend him if you can; For all his pride, and his philosophy, "Tis evident, beasts are, in their degree, As wise at least, and better far than he. Those creatures are the wisest who attain, By surest means, the ends at which they aim. If therefore Jowler finds and kills his hare, Better than Meers supplies committee-chair; Tho' one's a statesman, t'other but a hound, Jowler, in justice, will be wiser found.

De la fausse raison censeur impitoyable,
Je respectai toujours la raison véritable.

Qui pour mieux nous conduire a recours à nos sens,
Qui règle nos desirs sans gêner nos penchans,
Et, loin de s'opposer au vœu de la nature,

Rend notre jouissance et plus douce et plus pure.
Je vois, dans ma raison un ami qui me plait,
La vôtre est un pédant qui vous trompe et vous hait,
La mienne, quand j'ai faim, trouve bon que je mange;
Mais la vôtre, avant tout, par un caprice étrange,
Vous dit: Quelle heure est-il? et, pour chaque repas,
Consulte votre horloge et non votre estomac.
Pour nous entendre, enfin, désormais l'un et l'autre,
J'estime la raison, docteur, mais non la vôtre.

Pour l'homme, tout est dit, je n'en démordrai pas.
Vous voulez le défendre! entamons les débats :
De l'homme, dont la gloire ici vous intéresse,
Vous me vantez sur-tout la bonté, la sagesse;
Eh bien, que direz-vous, si je prouve aujourd'hui
Que la brute est plus sage et meilleure que lui?
La sagesse est, je crois, d'atteindre, en toute chose,
Par les plus courts moyens le but qu'on se propose.
Or, quand je vais aux champs, un fusil sous le bras,
Par l'odeur averti si, devançant mes pas,

Mon jeune lévrier attrape une bécasse

Tandis qu'un vieux ministre est déchu de sa place; En bonne foi, docteur, pourrez-vous me nier

prey;

You see how far man's wisdom here extends;
Look next, if human nature makes amends,
Whose principles most gen'rous are, and just,
And to whose morals you will sooner trust.
Be judge yourself, I'll bring it to the test,
Which is the basest creature, man or beast:
Birds feed on birds, beasts on each other
But savage man alone does man betray.
Press'd by necessity, they kill for food;
Man undoes man, to do himself no good.
With teeth and claws by nature arm'd, they hunt
Nature's allowance, to supply their want:
But man with smiles, embraces, friendship's praise,
Inhumanly his fellow's life betrays,

With voluntary pains works his distress;
Not thro' necessity, but wantonness.

For hunger, or for love, they bite or tear,
Whilst wretched man is still in arms for fear;
For fear he arms, and is of arms afraid;
From fear to fear successively betray'd.
Base fear, the source whence his best passions came,
His boasted honour, and his dear-bought fame;
That lust of pow'r, to which he's such a slave,
And for the which alone he dares be brave;
To which his various projects are design'd,
Which makes him gen'rous, affable, and kind;

Que le ministre alors le cède au lévrier.

Poursuivons, et voyons quel est le plus honnête,
Quel est le moins méchant de l'homme ou de la bête.
Un oiseau, j'en conviens, dine d'un autre oiseau,
Et, pressé par la faim, le loup croque l'agneau.
Mais sans aucun besoin, sans profit véritable,
L'homme attaque, trahit, déchire son semblable;
Pour calmer des besoins sans cesse renaissans
Le lion est armé de griffes et de dents,

L'homme seul contre l'homme emploie avec adresse
Le sourire, les soins, l'éloge, la caresse.
C'est la faim ou l'amour qui met l'ours en fureur,
L'homme, plus méprisable, est armé par la
par la peur.
Et tous les jours encore on voit ces mêmes armes
Qu'il saisit par frayeur lui causer mille allarmes.
Hélas, qui le croirait! il ne doit qu'à la peur
Ses plus nobles penchans, sa gloire, son honneur,
Et cette ambition dont il se rend l'esclave,
Pour qui, toujours tremblant, il tâche d'être brave,'
Vers laquelle il dirige et ses pas et ses vœux,
Qui le rend doux, sensible, affable, généreux,
Et qui, pour conserver son rang et son mérite,
Le force à se cacher sous un voile hypocrite.

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