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LORD LYTTLETON.

MONOLOGUE

D'UNE BEAUTÉ A LA CAMPAGNE.

MINUIT Sonnait, quand la jeune Flavie
Dans le salon laissant la compagnie,
Remonta seule à son appartement.
Là, regrettant la ville et le beau monde,
Triste, livrée à sa douleur profonde,
Elle s'assied, et dit en soupirant:
Hélas! que sert d'être jeune et jolie,
De réunir mille attraits enchanteurs,
Si, dans les champs, perdue, ensevelie,
Il faut languir loin des adorateurs?
Comme l'esprit, la beauté veut paraître;
N'être pas vue, autant vaut ne pas
être !
Où nul n'admire, à quoi sert de charmer?
Et pourquoi plaire où nul ne sait aimer?
De ces habits la facile élégance,

De ce maintien l'heureuse négligence,

The brutes, insensible, our pow'r defy
To love exceeds a 'squire's capacity.

The town, the court, is beauty's proper sphere;
That is our heav'n, and we are angels there.
In that gay circle thousand Cupids rove,

The court of Britain is the court of Love.

How has

my

conscious heart with triumph glow'd,
How have my sparkling eyes their transports shew'd,
At each distinguish'd birth-night ball, to see
The homage due to empire, paid to me!
When ev'ry eye was fix'd on me alone,

And dreaded mine more than the monarch's frown.
When rival statesmen for my favour strove,
Less jealous in their pow'r, than in their love.
Chang'd is the scene; and all my glories die,
Like flow'rs transplanted to a colder sky.
Lost is the dear delight of giving pain,

The tyrant joy of hearing slaves complain.

In stupid indolence my life is spent

Supinely calm and dully innocent.

Unblest I wear my useless time away!

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Sleep, wretched maid! all night, and dream all-day; Go at set hours to dinner and to pray'r;

For dullness ever must be regular.

Tout ce que peut ou la nature ou l'art,
Est sans effet près d'un lourd campagnard.

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La cour, la ville, ah voilà notre sphère! Femme jolie, ailleurs, est étrangère : Mais nous régnons à la ville, à la cour! C'est notre ciel, nous en sommes les anges. Tous les mortels, dans ce riant séjour Suivent nos pas et chantent nos louanges: La cour de Londre est la cour de l'amour. Spectacles, bals, soupers, brillantes fêtes, Combien de fois vêtes-vous mes conquêtes? Combien de fois vêtes-vous la beauté Ravir l'encens fait pour la majesté? Les courtisans, pour voler sur mes traces, Du prince alors oubliaient les faveurs : Mes yeux semblaient distribuer les grâces; Flavie, enfin, régnait sur tous les cœurs. Plaisirs charmans de causer tant de peines, Brillans captifs qui chérissiez mes chaînes, Vous n'êtes plus! une insipide paix, Un froid bonheur accable mes attraits. Il faut ici, grand Dieu quelle existence! Parler raison, agir avec décence! Dormir la nuit, et veiller tout le jour! Dès le matin, car rien, dans ce séjour, Rien ne se fait qu'au gré de l'étiquette, Tout est réglé, chaque chose a son tour:

Now with mamma at tedious whist I play;
Now, without scandal, drink insipid tea.
Or in the garden breathe the country air,
Secure from meeting any tempter there.
From books to work, from work to books I rove;
And am, alas! at leisure to improve!
Were eyes so radiant only made to read?
Is this the life a beauty aught to lead?

These fingers, at whose touch ev'n age would glow, Are these of use for nothing but to sew? Sure erring nature never could design

To form a house-wife in a mould like mine!

O Venus, queen and guardian of the fair, 'Attend propitious to thy votary's pray'r: Let me revisit the dear town again:

Let me be seen!-could I that wish obtain,
'All other wishes my own pow'r would gain!

Du déjeûner on passe à la toilette;
Puis du diner on entend la sonnette;
D'un triste whist partenaire distraite,

Maman me gronde; et puis, dans le jardin
Où j'étais hier, où je serai demain,

On marche, on cause, on arrête, on avance;
Enfin le thé vient sans la médisance.
Quoi, perdre ainsi son tems et ses attraits!
Prendre, quitter son livre ou son ouvrage
Et pouvoir même, ô douleur! ô regrets!
Pouvoir, hélas! au printems de son âge,
S'instruire encore et faire des progrès!
De la beauté voilà donc le partage!

Ciel, de tes dons fallait-il me combler? Pourquoi ces traits, ces grâces, ce sourire? Ces jolis yeux sont-ils donc faits

pour

lire?

Ces jolis doigts sont-ils faits pour ourler?
Moi, jeune, belle, étourdie et légère,
Etre une obscure et sage ménagère!

Vénus, Vénus, tendre divinité,
De la beauté, toi reine et protectrice,
Ah! prends pitié de ton adoratrice;
Viens essuyer les pleurs de la beauté ;
Ramène-moi, loin d'un séjour funeste,
Au doux séjour où m'attend le plaisir;
Daigne, Vénus, combler ce seul desir
Et mes attraits feront bientôt le reste!

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