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fait le sujet des Harangueuses. Ce sont les femmes d'Athenes, qui se sont mis dans la tête d'ôter aux hommes le gouvernement de l'Etat, et de s'en emparer. Cette piece est celle où il y a le plus d'esprit, et où la satyre est de meilleur goût. Elle est remplie de traits piquans contre le gouverne ment d'Athenes; mais c'est aussi celle où l'auteur a le plus maltraité les femmes : Euripide n'est rien en comparaison.

Plutus est une froide allégorie, dont on a pourtant emprunté les idées dans quelques pieces du théâtre italien.

Dans la piece qui a pour titre La Paix, l'auteur revient encore à son systême favori, et d'autant plus que Cléon était mort. Elle est aussi toute allégorique. La guerre et la paix y sont personnifiées. Un vigneron, nommé Trygée, paraît, monté sur un escarbot, et dit qu'il va sommer Jupiter d'être plus favorable aux Grecs. Qu'on imagine ce que c'est qu'une piece qui commence par un pareil spectacle. Il y a un endroit où la Paix demande ce que fait Sophocle depuis qu'elle á quitté l'Attique. On lui répond : « Il est devenu » aussi avare et aussi intéressé que le poëte Simo»nide. » C'est bien là le génie d'Aristophane; mais ce n'est pas, ce me semble, de la fine plai

santerie. Sophocle était alors d'une extrême vieillesse, et Aristophane l'avait loué dans d'autres pieces; mais il n'était pas juste qu'il l'exceptât de tous les grands-hommes qu'il a déchirés.

Reste deux pieces sur lesquelles il convient de s'arrêter un moment, parce que l'une a eu l'honneur d'être imitée par Racine, et l'autre le malheur de contribuer à la mort de Socrate. Lés Guêpes ont fourni à l'auteur de Britannicus la premiere idée de ses Plaideurs, comme le sujet de l'Enfant Prodigue, joué aux marionnettes de la Foire, fit éclore celui de Voltaire : d'où il résulte seulement

que le germe le plus informe peut être fécondé par le génie.

Philocléon est atteint précisément de la même maladie que Dandin; la fureur de juger l'a rendu fou, et son fils Bdelycléon le fait garder à vue. Il descend par une corde, comme Dandin sort par le soupirail. «Si je me casse le cou, dit-il, enterrez» moi au barreau. » Son fils, pour flatter un peu sa manie, lui propose d'exercer les fonctions de juge dans sa maison. Il se présente fort à propos un procès digne du juge; c'est un chien qui a volé un fromage. La cause se plaide dans les formes. Il y

a

le chien accusateur et le chien accusé, et l'un et l'autre jappent et parlent à la fois : c'est là le comique d'Aristophane. On amene les petits du

chien pour émouvoir la pitié du juge, qui se trompe dans le choix de ses deux féves, et qui donne celle d'absolution au lieu de celle de condamnation. C'est là ce que Racine a imité: joignez-y quelques détails, quelques jeux de théâtre, et observez surtout que Les Plaideurs sont une comédie du second ordre, qui descend même jusqu'à la farce dans la scene des petits chiens, et dont le principal mérite est dans le style, dans cette foule de vers charmans et de mots devenus proverbes. Il est pourtant vrai de dire que, malgré la distance prodigieuse de cette piece à celle qui en a donné l'idée, il y a dans l'une comme dans l'autre une critique très-vive et très - ingénieuse des vices et des ridicules du barreau. Mais qu'on se représente dans la piece grecque les juges d'Athenes déguisés en guêpes, avec leurs manteaux et leurs bâtons, et poursuivant Bdelycléon sur le théâtre à coups d'aiguillon : cette horrible mascarade, celle des grenouilles formant un chœur, celle de l'escarbot volant, et cent autres, sont des monstres sur la scene, et ne seraient pas tolérées sur nos derniers tréteaux. D'ailleurs le poëte grec, dans les deux derniers actes, abandonne entiérement son sujet, Philocléon, persuadé par son fils, qui lui a démontré que vie de juge était misérable, et qu'il n'y avait pas à gagner à beaucoup près autant qu'à ne rien faire

la

et à flatter le peuple, veut se conformer à ce conseil; il commence par s'enivrer, et occupe tout le cinquieme acte des plus dégoûtantes extravagances où puisse tomber un vieillard ivre. Toutefois, je le répete, il y a dans cette piece un germe de talent comique qui montre ce que l'auteur aurait'

pu

être s'il fût né dans un autre temps et avec un autre caractere; car le caractere influe beaucoup sur le talent, et ce n'est pas la méchanceté, la jalousie et la haine qui apprennent à faire des comédies.

Celle des Nuées, si malheureusement célebre, ne mérite en effet de l'être que par le mal qu'elle fit. Quoiqu'il y eût ving-cinq ans d'intervalle entre la représentation et le procès de Socrate, on ne peut douter qu'elle n'ait préparé l'injuste arrêt qui fit périr le plus honnête homme de la Grece puisque les accusations d'Anytus furent précisé ment les mêmes que celles que le poëte intente ici au philosophe.

Strepsiade, bourgeois d'Athenes, ruiné par un fils libertin qui dépense tout, qui est accablé de dettes et pressé par ses créanciers, rêve aux moyens de s'en débarrasser. Il n'en trouve pas de meilleur que d'aller consulter son voisin Socrate le philosophe, un de ces gens qui disent que le ciel est un four, et que les hommes sont des charbons, et qui

prouve que le jour est la nuit, et la nuit le jour. Ne voilà-t-il pas la philosophie de Socrate bien finement caractérisée ? Ce n'est pas celle qu'on trouve dans Platon. Le valet de Socrate fait beau-. coup de difficultés de recevoir Strepsiade, qui demande à être initié dans les mysteres de la philosophie. « Ce sont de grands mysteres, dit le » yalet. Socrate demandait tout à l'heure à son » disciple Chéréphon, quelle était la longueur du » saut d'une puce. » Strepsiade, émerveillé, appelle Socrate de toute sa force, et l'on aperçoit le philosophe guindé en l'air dans une corbeille. Strepsiade le conjure par les dieux. les dieux. « Doucement » par quels dieux jurez-vous? On n'admet point dans mon école les dieux du pays. » Strepsiade demande quels sont donc les dieux de Socrate? Il répond que ce sont les nuées : de là vient le titre de la piece. Il les invoque, et les nuées remplissent le théâtre en habit de costume, Socrate apprend à son nouveau disciple, que les nuées sont des déesses qui nourrissent les sophistes, les devins, les médecins et les poëtes. Il se moque de Jupiter, qu'il traite de chimere. « Il n'y a point de Jupiter, » dit-il, et ce qui le prouve, c'est que ce n'est

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point Jupiter qui fait pleuvoir, et que ce sont » les nuées seules qui donnent de la pluie, » Enfin, il exige que Strepsiade commence par renoncer

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