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Je supprimerais la faculté de théologie, et je ne crois pas qu'on me reproche cette fureur destructive que j'ai moi-même improuvée; mais il est bien temps que l'on cesse de disputer sur une religion divinement révélée depuis dix-huit siècles. Dieu l'a établie; l'Église en est la dépositaire; elle subsistera jusqu'à la fin des siècles : l'Enfer ne prévaudra point contre elle; Dieu lui-même l'a dit. Les séminaires suffisent pour y apprendre à connaître l'Écriture, la tradition, la doctrine des Pères et des conciles, et tout ce qui concerne les fonctions du ministère ecclésiastique; en un mot, ce qu'on appelle la théologie positive.

Je conserverais la place de recteur avec tous les honneurs académiques dont il jouit il n'y pas de mal qu'il y ait un chef des études, et un chef dont la place soit honorée; les jeunes gens en auront une plus grande idée de ces mêmes études et de leur importance. Il ne serait pas inutile qu'il visitât tous les mois les colléges, et qu'on lui présentât les élèves les plus distingués en chaque genre. Il y a un ordre d'idées attachées à chaque état, et, pour de jeunes étudians, une parole d'encouragement de M. le recteur peut et doit être un ressort d'émulation.

Je composerais le conseil du recteur de deux visiteurs généraux, élus tous les trois ans dans les assemblées de l'université, et chargés avec lui de l'inspection des études, pour en rendre compte

aux commissaires municipaux à qui ce département serait attribué. J'y joindrais un greffier, un bibliothécaire, un syndic chargé des détails d'administration, et les principaux des colléges. Tous ces membres du tribunal seraient éligibles de la même manière et pour le même temps, et payés suivant ce qui serait arbitré.

Il y a beaucoup trop de congés. Deux soirées par semaine, les dimanches et fêtes, doivent suffire au délassement nécessaire dans des études dont la distribution, telle qu'elle est depuis long-temps établie, ne peut jamais excéder les forces ni des maîtres ni des disciples. Il faut absolument retrancher, comme un abus, ces congés extraordinaires qui reviennent à tout propos, et ne pas permettre aux principaux des colléges d'en donner, comme ils font, de leur propre autorité. Une loi générale doit être portée à ce sujet, et maintenue par le tribunal. Les années d'éducation sont d'un prix qu'on ne sent pas assez; et un des grands avantages de cette époque de la vie et de l'instruction publique, c'est l'heureuse obligation d'employer le temps que dans la suite on prodigue si facile

ment.

Abolissons, par , par la même raison, l'usage que j'ai vu établi dans plusieurs colléges, de commencer les vacances par trois jours entiers de récréation. Cela n'est bon à rien, car les jeunes gens ne peuvent supporter si long-temps, ni la fatigue

du jeu, ni le poids de l'oisiveté. Réduisons les congés d'une journée entière à trois, dont deux sont trop solennels parmi les écoliers pour qu'il. soit possible de les leur ôter, le Landy et la SaintNicolas : ce sont de vieilles fondations qu'il faut respecter.

Je fixe à neuf ans accomplis l'âge où l'on peut être admis aux études des colléges. Je ne pense pas que l'on doive avant cet âge commencer l'étude des langues anciennes. Ce ne peut être que dans la vue de se débarrasser d'enfans dont on ne sait que faire chez soi qu'on les envoie à cinq ou six ans balbutier des termes de grammaire et des mots latins, en septième, en sixième, en cinquième, en quatrième; et l'on a pu voir ci-dessus que j'ai pourvu aux moyens de les occuper plus utilement jusqu'à neuf ans. Si je les appelle plus tard à ce genre d'instruction, c'est afin que la durée en soit à la fois plus courte et mieux remplie, A neuf ans, on peut communément entendre les élémens d'une syntaxe quelconque, les appliquer par le raisonnement, et par conséquent y faire des progrès beaucoup plus rapides et plus faciles; au lieu que l'enfance, en parcourant ces échelons qui se touchent, depuis la septième jusqu'à la quatrième inclusivement, fait en beaucoup de temps fort peu de chemin, et, n'étudiant rien autre chose que le rudiment latin, ne met dans sa tête que des mots le plus souvent mal appris.

XVIII.

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Ce n'est pas que je sois, à beaucoup près, de l'avis de ceux qui répètent sans réflexion que le latin n'est bon à rien. Ils en jugent par le peu de parti qu'en ont tiré le plus souvent ceux que nous voyons sortir des colléges. Mais ils devraient songer d'abord que cet inconvénient peut naître du peu de disposition naturelle que beaucoup d'élèves apportent à l'étude des langues savantes, et ce n'est pas par eux qu'il faut juger de l'importance de cette étude; ensuite, que le peu de progrès que la plupart y ont fait vient aussi de ce qu'on la leur a fait commencer dans l'enfance, pour qui cette espèce d'étude abstraite a naturellement peu d'attrait. J'en ai vu beaucoup qui ne faisaient rien en troisième et en rhétorique, précisément parce qu'ils avaient eu le temps de se dégoûter, dans les premières classes, d'un genre de leçon qu'ils ne pouvaient ni comprendre ni aimer. J'en ai vu qui, à douze ou treize ans, ayant de l'esprit naturel, commençaient à regretter, en rhétorique, en écoutant les auteurs anciens, qui commençaient à leur plaire davantage, de n'être pas à portée de les bien entendre: mais le mal était fait; ils ne pouvaient plus être au niveau de la classe, qui ne se trouvait jamais que celui d'un petit nombre d'écoliers distingués, la plupart redevables de leur supériorité à l'avantage de deux ou trois années; ce qui, à cette époque, est très-considérable.

Ne jugeons donc de l'utilité du latin, ni par

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ceux qu'on en a dégoûtés en faisant d'un rudiment le fléau de leur enfance, ni par ceux qui n'ont reçu de la nature aucune aptitude aux connaissances littéraires. Voyons les choses sans préjugé, et nous conviendrons que cette étude ne peut pas être séparée d'une éducation libérale et bien entendue. Je ne m'appuierai pas d'un fait reconnu, qu'il n'a pas existé parmi les modernes un seul homme du premier ordre, dans les lettres, dans les sciences, dans la magistrature, dans le ministère ecclésiastique, qui n'ait été un excellent humaniste: laissons les faits, de peur que l'on ne chicane sur l'application et les conséquences; examinons les principes. Quel est celui sur lequel est appuyée parmi nous l'étude des anciens dans l'éducation ? Sur ce qu'étant les meilleurs modèles dans les arts de l'esprit, c'est sur eux qu'il convient de former l'intelligence et le goût, et de modeler les travaux de la jeunesse. Ce principe ne saurait être raisonnablement contesté. C'est celui que suivaient les Romains, chez qui tout homme bien élevé étudiait les lettres grecques. Pourquoi les Grecs, au contraire, n'étudiaient-ils que leur langue? C'est qu'avant eux il n'y avait point de modèles connus ; ils en ont servi au monde entier : et il ne s'agit pas ici d'examiner pourquoi cet honneur, qui devait nécessairement appartenir à quelque peuple, a été l'apanage de celui-là. Ce qui est de fait, c'est que tout ce que nous savons, nous le tenons des an

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