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>> Elles se réduisent à trois: 1°. la religion, par >> laquelle nous devons commencer, continuer et » finir, parce que nous sommes de Dieu, par lui » et pour lui; 2°. la morale, pour se connaître » soi-même et les autres, ce que l'on peut et ce » que l'on doit dans les cas divers où il plaît à la » Providence de nous placer; 3°. la physique, » pour prendre une idée de la nature et de ses » opérations, de notre propre corps, et de ce qui » fait la santé ou la rétablit, et des arts divers » qui augmentent l'aisance en adoucissant les en>> nuis.

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» L'homme a une âme à perfectionner, des de>> voirs à observer, et une autre vie à prétendre. >> Il est sous la main de Dieu, lié à une société et chargé de lui-même. Or, le premier comman» dement de Dieu est qu'on lui rende hommage » de toutes ses facultés, en travaillant selon l'or»dre de la Providence. La première loi de toute » société est qu'on lui soit utile pour acheter » des services les avantages qu'elle procure. Le premier conseil de l'amour-propre est d'aug>> menter son bien-être par l'aisance que la raison >> permet, et la considération que le mérite at» tire. Il faut donc que l'on abjure sa destination » et son existence, ou que l'on connaisse les œu

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par

1 Qui n'est ici que l'amour de soi, réglé par la raison, comme cela est reçu dans la langue philosophique. ̧

les

>> vres de Dieu et le culte qu'il exige, les droits de >> la nature et les ressources de l'économie, >> lois de sa patrie et les talens qu'elle honore, » les moyens de la santé et les arts d'agrément. » Il faut adorer Dieu, aimer les hommes, et tra>> vailler à son bonheur pour le temps et pour l'é» ternité. Religion, morale, physique, ces trois objets se représentent sans cesse et ne se sépa>> rent point. >>

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Lisez ce morceau chez tous les peuples policés, quels qu'ils soient, je ne dis pas seulement chez des chrétiens, puisqu'il ne s'agit encore, dans ces prolégomènes, que du besoin d'une religion, mais chez toutes les nations qui ont senti ce besoin, puisqu'elles sont civilisées; portez cet exposé des premiers élémens de toute éducation publique à Constantinople, à Ispahan, à Dheli, à Pékin, partout il trouvera un assentiment universel, partout on y reconnaîtra ce que la raison a fait sentir à tout le monde, et ce que tout gouvernement a mis en principe et en pratique. Mais, au lieu de cet exposé si sage, et auquel il ne manque rien que ce que le christianisme seul pourrait encore y ajouter, allez présenter à quelque peuple que ce soit les inconcevables amphigouris qui servent de préambule à tous ces prétendus plans d'éducation qui se succèdent sans cesse parmi nous, et qui ne sont que des plans d'extravagance; tous ces volumineux fatras où l'on fait des efforts si visiblement hypo

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crites pour paraître ne pas renoncer à la morale, en mettant de côté Dieu et la religion; et partout l'on demandera de quel hôpital de fous sont sorties ces scandaleuses rêveries, et quel est le peuple assez insensé, assez malheureux, assez abject pou. qu'une pareille doctrine y puisse être publique, et soit même celle du gouvernement. Portez où vous voudrez l'arrêté tout récent du corps administratif d'une de nos provinces, qui déclare en termes exprès (et je me suis fait un devoir de les recueillir pour l'étonnement et l'horreur de la dernière postérité) que, fidèle aux principes républicains, il a soigneusement défendu aux instituteurs qu'il a nommés les écoles publiques de méler à leurs leçons rien qui puisse rappeler l'idée d'un culte religieux. Partout on se demandera quel doit être l'état d'un peuple dont les magistrats parlent ce langage au nom de la loi, et ce que peut être une république1 dont ce sont là les principes. La réponse ne pourrait être que l'histoire de la révolution tout entière, et j'avoue que cette réponse même laissera encore une longue et très-longue admiration... de l'éternelle

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1 Je ne doute pas qu'on ne demande aussi un jour s'il est bien vrai qu'on ait pu s'exprimer en public comme je fais ici, et prêcher cette doctrine en 1797, sans être surle-champ jeté dans un cachot, fusillé ou déporté. C'est le fait je ne puis que répéter de nouveau que tout cela fut textuellement prononcé en y joignant même tout ce que

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XVIII.

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sagesse, qui a voulu que la France tombât en délire pour être digne de ses maîtres les philosophes. Mais, me direz-vous encore, voilà un de ces maîtres qui parle ici raison. Oui, mais c'est sans conséquence; et il était si peu changé, que, dans le Code de la Nature, que nous allons voir, et dans le Supplément au voyage d'Otaïti, qu'on vient d'imprimer, rien ne peut se comparer à l'horreur et au mépris qu'il exhale, non pas seulement contre toute religion, mais contre toute loi morale, sociale et politique. Son exaltation de tête, qui ne faisait que croître en vieillissant, a marqué ses progrès dans les écrits de ses dernières années.... Mais enfin, dans ce conflit perpétuel d'idées opposées, de quel côté était la conviction?

Je l'ignore; mais il est beaucoup plus aisé d'expliquer la cause des paradoxes et des contradictions; elle est la même que celle de tant d'autres travers qui sont dans l'esprit humain, la vanité. C'est elle qui disait tout bas à Diderot, à Rousseau, à tous les sophistes : « Il faut faire du bruit : » pour en faire avec la vérité, il faut qu'elle soit >> bien éloquente; et cela est difficile, et pour

l'action oratoire pouvait me fournir de moyens. Mais ceuxlà le comprendront qui auront bien compris que jamais les mèchans ne peuvent aller que jusqu'où la Providence les méchans aillent. Ils ajournèrent leur vengeance, et ce ne fut que quelques mois après que cette Providence lui permit d'agir.

>tant n'est pas extraordinaire, car c'est la route » battue, où le talent et le génie ont marché de» puis long-temps. Ce qui frappe surtout, c'est >> l'extraordinaire; et quand on vient tard, il faut » le chercher. Or, quoi de plus extraordinaire que » de contredire hardiment la raison de tous les >> siècles? Rien n'étonne la multitude comme l'au >> dace de la déraison : c'est le sublime pour les >> sots; et combien de sots diront: Il faut que cet >> homme en sache plus que tout le monde, car il >> contredit tout le monde! >>

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Cette petite harangue de la vanité n'a-t-elle pas dû être très-persuasive chez un peuple devenu fou de vanité, à une époque où elle était le pre mier et presque le seul intérêt social, le premier mobile des paroles et des actions, où l'on se disputait, où l'on s'arrachait les succès et la célébrité, non-seulement devant le public, mais dans chaque maison, dans chaque cercle, partout où il y avait concurrence? Il est vrai que la raison dit aussi, quand c'est son tour de parler : Ils n'étaient donc que vains ces sages? Et quoi de plus petit et de plus puéril que la vanité? Quoi de plus opposé à la sagesse, qui apprécie les choses à leur valeur? Mais si cet orgueil ne paraît d'abord qu'une sottise dans son principe, voyez ce qu'il a été dans ses conséquences, et jugez si celui qui nous a dit que l'orgueil était la première source de tout mal, a bien connu l'homme et l'a bien instruit.

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