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cieux pour sortir de la bouche de Socrate. Mais qu'est-ce que tous les anciens devant un sage du dix-huitième siècle?

<< Portion organisée d'une matière éternelle, ou » peut-être ta créature; mais si je suis bienfaisant » et bon, qu'importe à mes semblables que ce » soit par un bonheur d'organisation, par des >> actes libres de ma volonté, ou par le secours de >> ta gràce?

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Cela peut ne pas importer à vos semblables, parce que, dans tous les cas, chacun ne répond que pour soi; mais cela pourrait vous importer à vous-même un peu plus que vous ne croyez, s'il vous plaisait d'y faire attention en raison de l'importance des objets.

L'auteur finit par recommander à ceux qui réciteront cette prière, qui est, dit-il, le symbole de notre philosophie, de lire aussi le précepte

suivant :

<< Puisque Dieu a permis, ou que le mécanisme >> universel 1 qu'on appelle destin a voulu que >> nous fussions exposés à toutes sortes d'événe» mens, si tu es homme sage et meilleur père que » moi, tu persuaderas de bonne heure à ton fils

1 Observez qu'il n'y a point de mécanisme qui ne suppose un machiniste, et qui par conséquent ne soit un effet, et non pas une cause; et pourtant ce mécanisme, cet effet, a pu vouloir; et les matérialistes et les athées ne sauraient écrire une page sans se contredire ainsi dans leurs propres

» qu'il est le maître de son existence, afin qu'il ne » se plaigne pas de toi, qui la lui as donnée. »>

C'est penser à tout. Et qui aurait cru que le chef-d'œuvre de l'amour paternel fût d'apprendre à son fils qu'il est le maitre de se débarrasser de la vie quand il lui plaira? La belle et consolante leçon, et la douce philosophie ! « Mon enfant, par» donne-moi de t'avoir donné la vie; car, après » tout, tu peux te l'ôter quand tu en auras assez. » Ces professeurs-là sont un peu comme le Timon d'Athènes, qui ne voulait recevoir de visites que de ceux qui auraient envie de se pendre, et qui avait planté un figuier tout exprès pour leur commodité, s'engageant de plus à fournir la corde. Il était juste qu'il arrivât à point une révolution toute propre à faire fructifier ces honorables documens; aussi Dieu sait, et lui seul sait tout ce que depuis ce temps il y a de suicides en France : les journalistes sont las de faire mention de ceux qui sont publics, sans compter ceux que l'on cache, et l'on n'y fait plus même attention. Dès avant la révotion, il était de mode de s'extasier en France sur, l'héroïsme du suicide, et c'est là ce qu'on admirait le plus dans le génie anglais. Déjà même cette

termes. Comment concevoir que des gens d'esprit consentent, pendant toute leur vie, à se payer ainsi de mots qui n'ont pas de sens? C'est bien là une véritable malédiction, et la sagesse suprême est bien vengée, dès ce monde, de ses aveugles ennemis.

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noble émulation avait gagné quelques têtes, et l'on avait vu deux jeunes gens qui s'étaient brûlé la cervelle en laissant un beau testament de mort qui attestait qu'ils n'avaient eu d'autre motif, pour se tuer, que de faire preuve de philosophie. Ce qui était alors un événement n'en est plus un de nos jours, et la vanité française devrait être contente d'avoir surpassé les Anglais, au moins en ce 'point. Mais qu'est-il arrivé ? Les Anglais, par esprit de contrariété anti-gallicane', n'ont plus jugé à propos de se tuer, quand ils ont vu que les Français en savaient là-dessus autant et plus qu'eux. Il n'est presque plus question de suicide en Angleterre, et la Tamise et le pistolet ne sont plus les remèdes du spleen: ils en ont cherché d'autres, et ont bien fait.

A l'égard du symbole de Diderot, je ne sais s'il est à l'usage de beaucoup de gens; mais quand ce serait un homme qui aurait fait le Pater, en vérité j'aimerais mieux le Pater.

1 L'un d'eux s'appelait, je crois, Bordeaux. Tous les papiers du temps rendirent compte du fait qui est authentique.

2 On sait qu'il y avait à Londres une société appelée les Anti-gallicans, dont l'esprit consistait à contredire tout ce qui se faisait en France.

SECTION V.

De l'Éducation publique.

Au moment où la destruction des jésuites laissait un grand vide dans l'instruction publique, et où l'on s'occupait à la fois des moyens de le remplir, et de quelques améliorations à effectuer dans le plan général des études; quand l'Émile de Rousseau venait de réveiller l'attention sur cet objet, Diderot aussi voulut être législateur en cette partie, et donna un petit Traité d'une centaine de pages sur l'Éducation publique. Vous croirez entendre ici un autre auteur, tant la religion tient une place éminente dans ce système d'études : mais vous ne devez nullement vous en étonner; c'était toujours le même homme, mais avec une autre ambition qui tenait aux circonstances. Il eût bien voulu que ce fût un philosophe qui eût l'honneur d'être le réformateur de l'instruction publique et de la discipline des colléges, et dès lors il n'y avait pas moyen d'être extravagant et impie. Il fut donc ici assez habituellement raisonnable; ce qui vous prouve que cette classe d'hommes l'aurait été comme les autres, si elle l'eût voulu, et qu'ils déraisonnaient par projet et par métier, beaucoup plus que par conviction. Diderot se crut d'autant plus obligé de se conformer ici aux idées générales, qu'il tenait beau

coup à son plan particulier, et ne désespérait pas de le voir adopté. Son ouvrage a du mérite : il y a même une partie très-bien traitée; c'est la première, celle qui contient la classification des objets de nos connaissances, l'une des meilleures que l'on ait faites, et où l'on reconnaît un homme à qui le travail de l'Encyclopédie avait donné l'habitude de l'analyse. Il y joint le mérite d'une diction nette, précise, souvent même énergique, et l'on voit que l'auteur avait soigné ce morceau. Mais il s'en faut de beaucoup que la seconde partie, celle où il en vient au choix et à la distribution des études classiques, soit aussi bien conçue; elle me parait défectueuse à bien des égards, et moins dirigée vers la perfection possible que vers Finnovation gratuite: c'est là que l'auteur retombe dans son faible. Je crois devoir m'arrêter un peu sur ce sujet, qui me conduit à des observations dont peut-être on pourra tirer quelque fruit lors du renouvellement des études, qu'il nous est permis de ne pas croire éloigné.

Écoutez ce préambule, et vous verrez que derot aussi peut vous édifier, comme un autre.

«

Di

J'appelle connaissances essentielles celles qui » ont des objets réels et nécessaires à tous les » états, dans tous les temps, et auxquelles rien » ne peut suppléer, parce qu'elles comprennent >> tout ce que l'homme doit absolument savoir et » faire, sous peine d'être dégradé et malheureux.

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