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culier à Herculanum, il existoit (dans le premier siècle de l'ere vulgaire) une bibliothèque d'à-peu-près dix-sept cents volumes ou rouleaux, que la lave du Vésuve a conservés jusqu'à nos

paroissoit affamé de livres, helluo librorum, s'il est permis d'employer ce terme pour exprimer une telle passion. »

Asinius Pollion fonda à Rome la première bibliothèque publique; elle étoit placée sur le Mont Aventin. Auguste établit une bibliothèque grecque et latine sur le Mont Palatin, et une autre, au nom de sa sœur Octavie, près du théâtre de Marcellus. En outre, il y en avoit une au Capitole, une dans le palais de Tibère, puis la bibliothèque Ulpienne foudée par Trajan, et réunie par Dioclétien à ses Thermes, pour en augmenter la magnificence.

Varron, l'un des plus savans et des plus féconds auteurs latins (il a fait près de cinq cents ouvrages), fut chargé par J. César do la direction des bibliothèques que ce dictateur se proposoit d'établir. Octave lui continua sa confiance pour le même objet; et Varron est le seul auteur romain dont la statue ait été placée de son vivant dans une bibliothèque publique.

Sénèque, qui avoit le goût des lettres, devoit avoir une fort belle bibliothèque, puisque, tout en écrivant sur le mépris des richesses, il jouissoit, dit-on, de trois millions de revenus.

Combien Pline l'Ancien n'a-t-il pas dévoré de livres pour composer son grand ouvrage? Personne n'a été plus passionné que lui pour la lecture; au lit, à table, à la promenade, il lisoit par-tout. « Je me souviens, dit son neveu (liv. III, epîtr. 5), qu'un jour le lecteur ayant mal prononcé quelques mots, un de ceux qui étoient à table l'obligea de recommencer. Quoi! ne l'avez-vous pas entendu, dit mon oncle? - Pardonnez-moi, reprit son ami. Pourquoi donc le faire répéter? votre interruption nous coûte plus de dix lignes. »

Pline le Jeune avoit bien hérité de cette passion de son oncle; mille passages de ses lettres en font foi, surtout celui où il dit : « Mecum tantum et cum libellis loquor. O rectam sinceramque vitam! O dulce otium, honestumque ac penè omni negotio pulchrius!

jours, mais que la chaleur avoit tellement calcinés et noircis, qu'à leur découverte ( le 3 nov. 1753) on les prit pour des charbons. Cette erreur en fit d'abord détruire un certain nombre, et ensuite on éprouva toutes les peines du monde à en dérouler quelques fragmens (1).

(1) Ces fragmens ont été publiés à Naples avec des fac-simile, en 1793, 1797 et 1809, 3 vol. in-folio. Les auteurs dont on a déjà pu découvrir des fragmens sont Philodème sur la musique et sur la rhétorique; Epicure sur la nature; Démétrius sur la géométrie, etc.; Colotès sur l'Isis de Platon; Polystrate sur la morale, etc.; Chrysippe sur la Providence, etc.; Phædrus, ami de Cicéron, sur la nature des Dieux, etc., etc. On voit par là que le goût dominant du propriétaire de cette bibliothèque étoit la philosophie et les arts.

M. Humphrey Davy, célèbre chimiste anglais, a présenté quelques observations relatives aux manuscrits d'Herculanum sur le déroulement desquels il a fait comme plusieurs autres, des essais à peu près infructueux. Il dit que le papyrus des manuscrits romains est en général plus épais que celui des manuscrits grecs. Les caractères romains sont ordinairement plus grands et les rouleaux plus volumineux. Les caractères des manuscrits grecs, à l'exception d'un petit nombre, sont plus parfaits que les latins. Il pa roît à M. Davy que les Romains, du moins jusqu'à Pline, n'ont point fait usage d'encre de noix de galle et de fer pour écrire. II' est remarquable, ajoute M. Davy, qu'il ne s'est trouvé dans toute la collection des manuscrits d'Herculanum aucun fragment de poésie grecque, et un très petit nombre seulement de poésie latine. Environ cent colonnes de différens ouvrages, déroulés sous la direction de M. Hayter et aux frais du roi Georges IV, ont été copiées et gravées par les artistes employés au musée. Il n'y a pas de doute que les rouleaux qui se trouvent au musée n'aient été dans un bien meilleur état, à l'époque où ils ont été découverts; les plus parfaits même ont été fort endommagés pendant les 69 ans qu'ils ont été exposés à l'air.

Ce qui prouve encore combien les Romains mettoient d'empressement à former des collections de livres, même comme objet de luxe, ce sont les plaintes que forme à cet égard Sénèque plaintes qui pourroient s'adresser à plus d'un moderne (1): « Rien de plus noble, dit-il, que la dépense qu'on fait pour se procurer des livres. Mais il ne faut pas que cela soit poussé à l'excès. A quoi sert une quantité innombrable de volumes dont le maître pourroit à peine dans toute sa vie lire les titres? Dévorer un grand nombre de livres, c'est surcharger sa mémoire. Il vaut beaucoup mieux s'en tenir à peu d'auteurs que d'en parcourir un grand nombre. Aujourd'hui que la plupart des hommes sont ignorans, les livres ne servent plus pour l'instruction on n'en fait

(1) « Comparandorum librorum (inquit Seneca de Tranquill. cap. 9), impensa liberalissima est; at in eâ habendus modus. Quid prosunt innumerabiles libri quorum dominus vix totâ vitâ suâ indices perlegit? Onerat discentem turba; multòque satius est tradere te paucis auctoribus, quam errare per multos. Nunc plerisque litterarum ignaris, libri non studiorum instrumenta sunt, sed ædium ornamenta. Paretur itaque quantum satis sit librorum, nihil in apparatum. Houestiùs, inquis, in libros impensas effundam, quam in vasa pretiosa, pictasque tabulas. Vitiosum est ubique quod nimium est. An ignoscas homini aptanti armaria cedro atque ebore, aut inter tot millia librorum oscitanti, cui voluminum suorum frontes maximè placent titulique? Apud desidiosissi mos videbis quidquid orationum historiarumque est, et tecto tenùs exstructa loculamenta. Sicque sacrorum opera ingeniorum in speciem tantum et cultum parietum comparantur.» ( Extrait abrégé.)

qu'une décoration d'appartement. On ne devroit se procurer que les ouvrages dont on a besoin, et non pas les acquérir pour en faire un vain ornement. Mais, direz-vous, ne fais-je pas mieux d'acheter des livres que des vases précieux et des tableaux? Par-tout l'excès est un défaut. Quelle idée avez-vous d'un homme qui assortit à grands frais des armoires de cèdre garnies d'ivoire, ou de celui qui bâille au milieu de tant de volumes, et dont le plaisir consiste à en lire les frontispices et les titres? On voit chez les hommes les plus oisifs tout ce qui appartient à l'histoire et à l'éloquence, et des rayons garnis jusqu'au plancher. C'est ainsi qu'on n'acquiert les productions sa→ crées du génie que pour en faire parade et pour en tapisser des murs (1). »

Quand Séneque traçoit ces lignes, la décadence de la littérature romaine s'annonçoit déjà ; et bientôt, marchant de front avec la décadence de l'em

(1) Ce passage prouve qu'il y avoit à Rome des bibliothèques particulières assez volumineuses; en effet on raconte qu'un certain Epaphrodite de Chéronée, grammairien qui a vécu à Rome dans l'intervalle du règne de Néron à celui de Nerva, possédoit unë bibliothèque de trente mille volumes; et Sammonicus Serenus, poëte du troisième siècle et médecin, que Caracalla fit tuer comme ayant été du parti du malheureux Geta, avoit réuni dans la sienne soixante-deux mille volumes, quantité prodigieuse sous le rapport de la cherté du parchemin, du papyrus et des manuscrits. Sammonicus son fils, hérita de cette collection précieuse, et en fit don à Gordien III, dont il étoit ou avoit été le précepteur.

pire, elle s'affoiblit insensiblement et finit par disparoître sous les épaisses ténèbres qui couvrirent l'Europe pendant près de mille ans. Invasions des Barbares sur tous les points de l'empire, destructions, ruines, mœurs grossières, usages bizarres, querelles religieuses, guerres civiles, schismes, meurtres, ignorance à-peu-près complète de la littérature classique, tels sont les tristes objets qu'offre le sombre tableau du moyen âge.

Quel fut le sort des lettres dans cette longue période de deuil et de misère? Que devinrent les beaux génies du siècle d'Auguste? Délaissés, méprisés, ignorés, ils n'échappèrent à une destruction totale qu'en se réfugiant furtivement dans quelques monastères (1), dans quelques souterrains où ils dormirent d'un long sommeil, qui pour les uns fut un sommeil de mort, et dont presque tous les autres ne se réveillèrent que mutilés, soit par les injures du temps, soit par un zèle

On ne peut nier que si nous possédons maintenant une bonne partie des chefs-d'œuvre de la littérature classique, c'est aux moines du moyen âge que nous en avons obligation. Ces pieux cénobites employoient tout le temps que les exercices religieux ne réclamoient pas, à copier les anciens manuscrits, soit sacrés soit profanes. C'est ainsi qu'ils nous ont conservé beaucoup d'auteurs latins. Tous les grands monastères avoient chacun une chambre appelée scriptorium; c'est là que les copistes transcrivoient les manuscrits qui leur étoient désignés par l'abbé,

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